FL – Platon, Critias ou De l’Atlantide

Philosophie – Fiches de lecture


Retrouvez dix œuvres philosophiques majeures, dans les tomes 1 et 2 des Fiches de lecture de Philosophie ! (Cliquer sur l’image pour découvrir l’ouvrage)

Platon, Apologie de Socrate
Aristote, Éthique à Nicomaque
Épicure, Lettre à Ménécée
Arrien, Le « Manuel » d’Épictète
Descartes, Discours de la méthode

Spinoza, L’Éthique
Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs
Nietzsche, Ecce Homo
Bergson, L’Évolution créatrice
Sartre, L’existentialisme est un humanisme

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Fiche de lecture n° 38

Eléments contextuels

Éléments biographiques et doctrine générale

Platon (427 – 347 av. J.-C.) est le disciple et le “porte-parole” de Socrate. C’est le premier philosophe (occidental) dont nous disposons des œuvres considérées comme complètes. La forme la plus fréquente est le dialogue, et le plus souvent c’est Socrate qui utilise la dialectique (l’art de raisonner en discutant) et la maïeutique (l’art d’accoucher les esprits de leurs idées).

Platon distingue le monde sensible, celui où nous vivons, où nous percevons la réalité par nos sens ; et le monde intelligible, celui des Idées (du grec eidos, forme), ces essences éternelles, immuables (le Bien en soi, le Beau, la Justice, etc.).

L’œuvre

Le Critias fait partie des œuvres tardives de Platon (période de -370 à -347). C’est un dialogue inachevé, qui s’interrompt sur l’explication de la décadence de l’Atlantide. Cette île créée par Poséidon et régie selon ses lois présente des similitudes avec la Cité idéale de Platon, composée de producteurs, de gardiens et gouvernée par des philosophes-rois. Voici l’analyse de François Jullien sur ce texte, effectuée par comparaison avec un récit de la tradition chinoise.

L’île des Atlantes est aussi séparée du monde avant d’être enfouie dans les flots. Son évocation est également sous le règne du superlatif : les richesses y sont possédées en extrême abondance, les matériaux fournis à foison, les productions de la terre en quantité illimitée ; les édifices y sont admirables et gigantesques, etc. Le pouvoir est exercé selon les instructions de Poséidon et les rois gouvernent avec sagesse. […] Platon vieillissant a ouvertement rompu dans le Critias avec le projet qui était précédemment le sien de construire, selon un modèle rationnel, la Cité parfaite dont la cité des hommes devrait ensuite “le plus possible” se rapprocher. F. Jullien,  L’invention de l’idéal et le destin de l’Europe, p. 158-159.

La seconde partie de cette citation de François JUllien évoque la chute de la Cité des Atlantes, qui pourtant semblait se rapprocher “le plus possible” de la Cité idéale de Platon.

Concernant le caractère inachevé de ce dialogue, Léon Robin, dans l’édition de la Pléiade, met en garde contre toute interprétation trop hâtive et non fondée de cet inachèvement, et contre toute hypothèse sur ce qu’aurait pu être la suite :

Il est probable que ce “reste” n’a jamais été écrit : sans quoi, nous en aurions vraisemblablement gardé quelque citation. Quant à dire pourquoi Platon n’a pas poursuivi sa composition, on ne peut faire à ce sujet que des conjectures hasardeuses, toutes également invérifiables. L. Robin, note n° 1 de la p. 547, édition de la Pléiade des Oeuvres complètes de Platon, p. 1511.

Les personnages

Les quatre personnages qui composent le Critias sont les mêmes que ceux du Timée, puisqu’il s’agit de la continuation d’un même dialogue. Le Timée portait sur la Nature et la cosmologie. 

  • Timée de Locres, philosophe pythagoricien, proche de Socrate ;
  • Critias, homme politique, philosophe, orateur et poète (c’est lui qui fait le récit de l’Atlantide) ;
  • Socrate ;
  • Hermocrate, homme politique et stratège, acteur de la guerre du Péloponnèse.

Synthèse globale

Critias poursuit le dialogue entamé par Timée autour des dieux, avec le récit de la guerre d’Athènes contre l’Atlantide, neuf mille ans auparavant. Ce récit lui vient des écrits de Solon, homme politique grec, qui le tenait lui-même de prêtres égyptiens.

En son temps « préhistorique”, la Cité d’Athènes, placée sous la protection d’Héphaïstos et d’Athéna lors du partage de la terre entre les dieux, était organisée en classes sociales : dirigeants, gardiens et producteurs (artisans et agriculteurs). Elle était renommée pour sa justice et pour les mérites des âmes des Athéniens.

L’Atlantide était une île dont le dieu protecteur était Poséidon. Le royaume était une monarchie héréditaire issue des descendants d’Atlas, premier roi de l’île. Le pays était très riche, les terres fertiles, les ressources abondantes. La vertu régnait jusqu’à ce que la part d’humain chez les Atlantes l’emporte sur leur part divine. Cette dépravation provoqua le châtiment du Dieu des Dieux. Le dialogue est inachevé et s’interrompt sur l’assemblée des dieux qui doit décider du châtiment que va subir l’Atlantide.

Plan du texte, synthèse et extraits

Prologue

Timée vient de finir son discours sur la Nature, en concluant sur le Dieu sensible qui est à l’image du Dieu intelligible. Critias accepte de poursuivre le dialogue avec la naissance des dieux comme objet. Il introduit son propos en faisant remarquer qu’il est plus facile de parler des choses divines que des choses humaines. Imiter ou figurer par des images les dieux est plus simple car “nous n’avons aucune connaissance exacte” d’eux et que la ressemblance suffit. Se donner une image exacte des choses humaines, mortelles, est plus difficile puisque nous pouvons les soumettre à un examen beaucoup plus rigoureux. Critias sollicite l’indulgence de ces auditeurs, et Socrate la lui accorde pleinement, en précisant qu’Hermocrate “parlera le troisième”, c’est-à-dire après le discours que vient de faire Timée, suivi de celui que va exposer maintenant Critias. Ces dialogues auraient ainsi constitué une trilogie : le Timée, le Critias, l’Hermocrate. Malheureusement, nous ne disposons que du premier dans son intégralité et du deuxième inachevé. Le troisième dialogue ne nous est pas parvenu.

Critias débute son discours en invoquant Mnémosyne, la divinité du souvenir, pour qu’elle l’aide à mener à bien sa tâche : rapporter l’histoire que Solon, homme d’État, législateur et poète athénien, avait recueilli auprès des prêtres d’Égypte. Pour mémoire, Solon fait partie des Sept Sages de la Grèce, il aurait instauré la démocratie à Athènes (voir l’article Les origines de la Philosophie – L’École ionienne).

Cette histoire s’est déroulée il y a neuf mille ans, lorsque la guerre a été déclarée entre Athènes et l’île Atlantide, située en dehors des colonnes d’Hercule [le détroit de Gibraltar], et qui “était alors plus grande que la Libye et l’Asie ensemble”, et qui par la suite a été engloutie par des tremblements de terre. Critias annonce qu’il présentera les deux adversaires, et notamment “la forme de leur gouvernement”.

L’Athènes préhistorique

Il y eut une fois entre les Dieux […] un partage par régions de la terre tout entière, partage réglé par un sort […] comme c’était aux sorts de la Déesse Justice qu’ils devaient d’avoir obtenu le lot qui avait leurs préférences, ils s’établissaient dans leurs régions respectives, et, une fois qu’ils s’y étaient établis, pareils à des pasteurs à l’égard de leurs troupeaux, ils étaient des nourrisseurs pour nous qui sommes leur propriété et leur bétail ; avec cette différence qu’ils n’usaient pas de leur corps pour violenter le corps de leurs bêtes, à la façon des bergers qui les frappent quand ils les mènent paître ; eux, au contraire, par où le mieux se laisse retourner un animal, c’est à la poupe qu’ils se plaçaient pour en redresser la marche, usant, selon leurs propres desseins, de la persuasion comme d’un gouvernail pour mettre la main sur son âme et, les menant de la sorte, ils gouvernaient, comme on gouverne un navire, la totalité des êtres mortels. 109 b-c.

Les Dieux protecteurs d’Athènes étaient Héphaïstos et Athéna, frère et sœur orientés vers la même fin par “l’amour du savoir et l’amour de l’art”.

Les noms des Anciens, premiers autochtones de la région d’Athènes, ont d’abord subsisté avec la tradition de donner leurs noms aux enfants. Avec l’évolution de la Cité, l’étude des légendes et de l’Antiquité a sauvé de l’oubli les noms de ces Anciens.

Il n’y avait pas de différence entre hommes et femmes : toutes les fonctions des institutions étaient partagées, y compris militaires.

[…] chacun est, de nature, capable d’exercer en commun de façon méritoire l’occupation qui convient à chaque sexe. 110 c.

Critias décrit deux classes sociales dans l’Athènes préhistorique : les citoyens producteurs occupés “aux métiers ainsi qu’au travail de la terre” ; et la classe des combattants comprenant les gardiens et les chefs. Cette tripartition se retrouve dans la description de la Cité idéale selon Platon, notamment dans le livre III de la République sur la constitution de l’État modèle :

[…] le Dieu qui vous façonne, en produisant ceux d’entre vous qui sont faits pour commander, a mêlé de l’or à leur substance, ce qui explique qu’ils soient au rang le plus honorable ; de l’argent, chez ceux qui sont faits pour servir d’auxiliaires [les Gardiens] ; du fer et du bronze dans les cultivateurs et chez les hommes de métier en général. Platon, La République, Livre III, 415 b.

L’Athènes préhistorique s’étendait de l’Isthme de Corinthe aux sommets du Cithéron et du Parnès (à une trentaine de kilomètres au nord d’Athènes). Les terres étaient les meilleures et produisaient sans limites. Des forêts couvraient les montagnes et leurs arbres étaient utilisés pour faire “la charpente des plus grands édifices”. L’eau coulait également en abondance.

La cité même comprenait une acropole (ville haute), citadelle et lieu saint, habitée par la classe des combattants. Les artisans et les cultivateurs occupaient les pentes de l’Acropole et les champs alentour.

Critias conclut cette présentation de l’Athènes préhistorique par un éloge de cette Cité antique.

Aussi bien, puisque justement tels étaient personnellement ces hommes, c’était aussi toujours d’une telle façon qu’avec justice ils administraient leur propre patrie et la Grèce ; fameux par conséquent dans toute l’Europe et toute l’asie, tant pour la beauté de leurs corps que pour les mérites divers de leurs âmes et jouissant, parmi tous les hommes de ce temps, d’une renommée sans égale. 112 e. 

L’Atlantide

Critias va maintenant exposer la nature et les origines de l’Atlantide. Il avertit ses auditeurs que les noms atlantéens des personnages qu’il évoquera ont été d’abord traduit en égyptien, puis en grec, et ajoute une anecdote personnelle assez touchante.

Or donc, ces écrits de Solon se trouvaient chez mon grand-père, ils se trouvent encore chez moi à cette heure, et j’en ai fait, étant enfant, une étude minutieuse. Si donc vous m’entendez dire des noms pareils à ceux de chez nous, n’en concevez nul étonnement, puisque vous en connaissez les raisons. Mais voici maintenant comment commençait cette histoire. 113 b.

Lors du partage de la terre entière entre les Dieux, Poséidon a obtenu l’Île Atlantide. Il l’a peuplée avec les enfants nés de son union avec une femme mortelle, Clitô, fille unique d’un des habitants primitifs de l’île. Poséidon commença à modifier la géographie de l’Atlantide en abattant des pans de montagne et en faisant jaillir une double source d’eau chaude et d’eau froide. Il institua un gouvernement sous la forme d’une monarchie héréditaire. Le premier de ces rois fut Atlas, qui donna ainsi son nom à l’île Atlantide et à la “mer” Atlantique.

Les richesses possédées par les descendants d’Atlas étaient d’une abondance telle qu’il n’en a jamais jusqu’à présent existé de pareille dans une dynastie royale et que, par la suite, il n’en existera jamais une autre […]. 114 d.

Les Atlantes vivaient en autosuffisance, même s’ils importaient “un très grand nombre d’articles”. Les ressources minières étaient importantes : “tout ce qu’il y a de métaux”, dont l’orichalque (le cuivre de montagne) et l’or. Les forêts fournissaient en “surabondance” l’industrie du bois. Les animaux sauvages et domestiques étaient nombreux : il y avait même des éléphants. La terre produisait des fruits et des légumes à foison.

[…] tout ce que nous offrons, comme un agréable réconfort d’après souper au convive qui souffre d’avoir trop mangé, toutes ces choses sans exception, l’île qui existait alors sous le soleil les portait dans leur sainte beauté, aussi merveilleuses qu’innombrables. 115 b.

Le programme de construction établi par les Atlantes comportait des grands travaux (ports, arsenaux de marine, canaux et voies de communication, ponts) et des bâtiments (demeures royales, sanctuaires). Une volonté esthétique accompagnait ce programme.

Pour ce qui est maintenant des bâtiments, les uns étaient tout simples ; dans les autres, on entremêlait les diverses pierres, tissant ainsi, pour s’en amuser, un bariolage de couleurs : ce qui donnait à ces constructions un agrément naturel. En outre, tout le pourtour du mur attenant à l’enceinte la plus extérieure avait été garni de bronze, utilisé comme on utilise un enduit, et, d’autre part, le mur de l’enceinte intérieure, tapissé d’étain fondu. Quant à celui qui entourait l’acropole elle-même, on l’avait revêtu d’un orichalque ayant l’étincellement du feu. 116 b-c.

La résidence royale située sur l’acropole comprenait un sanctuaire consacré à Clitô et à Poséidon. La chapelle personnelle de Poséidon mesurait environ 200 mètres de long sur 90 mètres de large, “et une hauteur proportionnée pour l’œil à ces dimensions”.  Le plafond était en ivoire, décoré avec de l’or, de l’argent et de l’orichalque. Une statue en or représentant le dieu Poséidon atteignait le sommet du plafond. Elle était encerclée par cent Néréides (des nymphes marines) chevauchant des dauphins.

Autour de la chapelle, à l’extérieur, s’élevaient des images en or de l’ensemble de ceux, les femmes aussi bien que les hommes, qui avaient été la postérité des dix rois […]. 116 e.

Les sources d’eau froide et d’eau chaude coulaient de façon illimitée. Elles étaient utilisées pour l’agrément et pour leur vertu, sous forme de réservoirs pour les bains ou d’irrigation pour les jardins. De nombreux aménagements étaient dédiés aux jeux et aux sports : gymnases, manèges pour chevaux, hippodrome. L’île comptait trois ports, dont le plus grand regorgeait de vaisseaux venant de partout, de jour comme de nuit.

Après avoir évoqué l’organisation des villes et les constructions, Critias décrit la configuration du pays.

[…] d’après la tradition, la contrée dans son ensemble était très élevée et sortait à pic de la mer ; mais, autour de la ville, ce n’était qu’une plaine, laquelle entourait cette dernière, tandis qu’elle était elle-même entourée par un cirque de montagnes qui descendaient jusqu’au bord de la mer : plaine unie, tout en paliers et, dans son ensemble, plus longue que large, mesurant d’un bout à l’autre trois mille stades de long [540 kilomètres environ] et deux mille stades [360 km] en montant de la mer jusqu’au centre ; cette région de l’île entière était orientée au midi, et abritée des vents glacés venant du nord. 118 a-b.

Les montagnes comptaient des villages, des fleuves, des lacs, des prairies. Les différents rois avaient peu à peu recomposé le paysage. Un système d’irrigation conduisait les eaux descendant des montagnes vers la plaine, puis elles se déversaient dans la mer. Des canaux permettaient d’acheminer le bois des forêts de montagnes jusqu’à la ville, ainsi que “divers produits saisonniers”. Il y avait deux récoltes annuelles et l’eau était gérée en fonction des saisons : eau de pluie l’hiver, et eau des canaux l’été.

Le pays était divisé en dix principautés et en soixante mille cantons, dotés chacun d’un chef et de soldats venant compléter l’organisation militaire du royaume entier.

Chacun des dix rois, sur la portion du territoire qui lui était dévolue, avait une autorité personnelle absolue sur les hommes et sur presque toute la législation dans l’État qui était le sien, punissant et faisant périr qui il voulait. D’autre part, ce qui concernait l’autorité des rois les uns sur les autres et leurs mutuelles relations était conforme à des ordres émanant de Poséidon lui-même, tels qu’ils leur avaient été transmis par la coutume et par une inscription que les premiers d’entre eux avaient fait graver sur une stèle d’orichalque, érigée au centre de l’île dans le sanctuaire de Poséidon. Les rois donc s’assemblaient alternativement, parfois au bout de cinq ans et parfois au bout de six ans, faisant ainsi la part égale au pair et à l’impair : assemblée consacrée à délibérer sur les affaires communes et aussi à examiner si tel d’entre eux avait, sur quelque point, [contrevenu] aux ordres de Dieu ; enfin à rendre un jugement. 119 c-d.

Les rois rendaient leur jugement après avoir effectué le sacrifice d’un taureau et avoir prêté serment de juger en conformité avec la loi gravée sur la stèle. Après ce voeu, chacun buvait le sang du taureau dans une coupe. Le jugement était gravé sur une table d’or. Les rois étaient soumis à des lois particulières : ne pas se combattre entre eux, se porter mutuellement secours, respecter l’autorité dirigeante attribuée à la famille d’Atlas. Ils ne pouvaient tuer un membre de leur famille que si cette mort recueillait l’assentiment de plus de la moitié des rois.

Dans la dernière partie du dialogue, Critias fait l’éloge des Atlantes et commence à expliquer ce qui a causé leur perte. Malheureusement le texte s’interrompt avant qu’il ait achevé cette explication.

Pendant de multiples générations, aussi longtemps que la nature du Dieu suffit à les inspirer, les Atlantes restèrent dociles à la voix de sa législation et favorablement disposés à l’égard du fondement divin de leur mutuelle parenté. Ils avaient en effet des façons de penser pleines de vérité et grandioses à tous égards ; ils se comportaient avec une mansuétude accompagnée d’intelligence, aussi bien envers les constantes vicissitudes de la vie, que les uns envers les autres. 120 e.

La vertu dominait sur toute autre considération. Malgré leurs richesses, les Atlantes restaient maîtres d’eux-mêmes, pratiquant une amitié vertueuse. Le problème vint avec la prédominance chez eux de leur caractère humain. Leur condition leur parut pesante, ils se comportèrent de façon moralement inconvenante, cupide et injuste.

C’est alors que le Dieu des Dieux, lui qui règne au moyen de lois et dont la qualité est d’être capable d’observer ce genre de choses, songeant à quel point de dépravation en était venue une race excellente, prit le parti de lui imposer un châtiment, afin de la faire rentrer dans la mesure par la leçon qu’il leur aurait infligée. Il assembla donc tous les Dieux dans celle de leurs demeures qui a le plus de prix, celle précisément qui, se trouvant au centre du monde entier, a vue sur tout ce qui participe au Devenir, et, une fois qu’il les eut assemblés, il leur tint ce langage… / Le reste manque. 121 b-c.

Le dialogue s’interrompt ici. En guise de conclusion additionnelle, nous citerons à nouveau la remarque de Léon Robin sur ce “reste” manquant, puis nous laisserons Platon décrire la fin de l’Atlantide, issue du Timée, dialogue qui précède le Critias.

Il est probable que ce “reste” n’a jamais été écrit : sans quoi, nous en aurions vraisemblablement gardé quelque citation. Quant à dire pourquoi Platon n’a pas poursuivi sa composition, on ne peut faire à ce sujet que des conjectures hasardeuses, toutes également invérifiables. L. Robin, note n° 1 de la p. 547, édition de la Pléiade des Oeuvres complètes de Platon, p. 1511.

Dans le Timée, Platon, par la bouche de Critias, fait un récit synthétique de la lutte d’Athènes contre l’Atlantide, dont voici la fin.

Mais, dans le temps qui suivit, il se fit des tremblements de terre violents et des cataclysmes ; dans l’espace d’un jour et d’une nuit funestes qui survinrent, de vos combattants le peuple entier, en masse, s’enfonça sous la terre, et pareillement l’Île Atlantide s’enfonça sous la mer et disparut. De là vient que, de nos jours encore, là-bas la mer est impraticable et inexplorable, encombrée par les bas-fonds de vase que l’île a déposés en s’abîmant. Platon, Timée, 25 c-d. 

Bibliographie

Platon, Oeuvres complètes, tome II, Bibliothèque de la Pléiade.

François Jullien, L’invention de l’idéal et le destin de l’Europe, Seuil.

Entendre aussi

France Culture, Les Chemins de la philosophie, Fabuleux Platon ! Épisode 3 : Le mythe de l’Atlantide : la perfection est-elle de ce monde ?

Voir aussi

Notes philosophiques : Platon, Timée ou De la Nature – Les maladies de l’âme ; Les origines de la Philosophie – L’École ionienne.


Patrick Moulin, alias @dsirmtcom,  juin 2021.

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